Le new jack swing

Origines et histoire du new jack swing

Le new jack swing est à l’origine un genre musical de la fin des années 1980, fusionnant le R&B et le hip-hop, popularisé par des producteurs comme Teddy Riley. Ce nouveau son a donné naissance à un style de danse urbain associé, souvent appelé « Hype » en France. Apparu vers 1987-1988, au moment où émergent les premiers morceaux new jack swing, ce style de danse s’est développé à la fin des années 80 et a connu son apogée au début des années 90. Il représente le renouveau festif de la danse hip-hop à cette époque, après l’ère du breakdance et des funk styles des années 70-80. Dès sa création, la danse new jack swing s’est diffusée à travers les clips vidéo, les concerts et les films, ce qui l’a propulsée sur le devant de la scène grand public. En 1990, le film House Party a par exemple mis en lumière ces nouvelles danses de fête et la culture hip-hop auprès d’un large public. Des artistes majeurs de la fin des années 80 et du début 90, tels que Janet Jackson, Boyz II Men, Bobby Brown ou Michael Jackson, ont contribué à populariser le mouvement en intégrant ces danses dynamiques dans leurs clips et tournées. Le terme « new jack swing », inventé à l’origine par un journaliste pour décrire la nouvelle vague musicale, a été adopté pour désigner le style de danse associé, bien qu’aux États-Unis on parle plus volontiers de party dances ou d’old school hip-hop pour évoquer ces pas des années 90.
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Invention et développement du style dans la danse urbaine

Contrairement à d’autres danses urbaines ayant un créateur identifié, le new jack swing en danse s’est inventé et développé de manière collective au sein des soirées et clubs urbains. Il s’agit en réalité d’une synthèse de multiples pas de fête (party dances) apparus spontanément dans le sillage de la nouvelle musique swingbeat. Les danseurs des quartiers urbains, notamment à New York et sur la côte Est des États-Unis, ont commencé à caler leurs mouvements sur les rythmes hip-hop et R&B syncopés et entraînants propres au new jack swing. Le style puise ainsi ses racines dans des danses préexistantes : on y retrouve des influences du hip-hop old school (pas debout des années 80), de la funk (l’héritage des danses funk et du locking popping), mais aussi de la danse africaine et du jazz. Cette fusion des genres a façonné une esthétique inédite à la fin des années 80.

En quelques années, la new jack swing a évolué d’une danse purement sociale (improvisée dans les fêtes) vers une forme plus chorégraphiée. Dans les clips et performances scéniques du début des années 90, il n’est pas rare de voir plusieurs danseurs exécuter en synchronisation parfaite des pas de new jack swing, ce qui donne une impression d’énergie et de force collective sur scène. Ce passage du cercle de danse improvisé à la chorégraphie de groupe a marqué le développement du style. Des chorégraphes de l’époque incorporent ces mouvements dans les shows d’artistes R&B/hip-hop, asseyant la légitimité du new jack swing comme une composante à part entière de la danse hip-hop. Par exemple, le duo de danseurs Kid’n Play a introduit un pas emblématique (le Kid’n Play kick) dans une chorégraphie de battle amicale du film House Party, illustrant la façon dont ces danses de rue pouvaient être intégrées dans des mises en scène travaillées.
Au milieu des années 90, l’influence du new jack swing commence à se transformer. La musique hip-hop évolue vers de nouveaux sons (rap East Coast/West Coast, puis R&B plus moderne), entraînant l’apparition du « New Style », une nouvelle vague de danse hip-hop post-2000. Le new jack swing, en tant que style, devient alors un précurseur qui a ouvert la voie : on le considère comme un « ancêtre » du hip-hop new style contemporain. Son héritage se perpétue à travers les danseurs qui continuent d’incorporer ses pas de base et son esprit festif dans leurs propres styles.

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Place du new jack swing dans la culture hip-hop

Le style new jack swing occupe une place particulière dans la culture hip-hop, en tant que symbole de l’âge d’or des danses debout des années 90. Durant cette décennie, il représente la facette fun et grand public du mouvement hip-hop, en contraste avec le breakdance plus acrobatique ou le rap hardcore émergent. La Hype est ainsi devenue la danse phare des clips vidéo des années 90, quasiment chaque vidéo d’artistes hip-hop/R&B de l’époque comportait des séquences de danse new jack swing. Son succès a été tel que maîtriser les derniers pas de danse à la mode était un véritable phénomène de société chez les jeunes: savoir faire un Running Man ou un Roger Rabbit suffisait pour briller sur les pistes de danse de quartier ou dans les boums, au même titre que porter les sneakers à la mode ou connaître les paroles des hits du moment.

Grâce aux médias, le new jack swing s’est diffusé mondialement. Des émissions TV, films et tournées internationales ont apporté ces danses jusqu’en Europe et en Asie. En France, on a rapidement adopté la « Hype » dès le début des années 90, avec des danseurs hexagonaux qui se sont approprié le style et des cours de hip-hop intégrant ces bases. Par exemple, l’émission télévisée H.I.P. H.O.P. animée par Sydney dans les années 1980 avait lancé la vague hip-hop en France, et la décennie suivante a vu un engouement pour les danses new jack swing, considérées alors comme du « hip-hop 90 ». Aujourd’hui encore, certaines écoles et stages de danse proposent des cours dédiés à la Hype, témoignant de l’héritage toujours vivant de ce style.

Dans les battles et compétitions actuelles, le new jack swing est présent de façon indirecte. Il n’existe pas forcément une catégorie nommée « Hype » à part, mais les pas old school des années 80-90 font partie du vocabulaire qu’un danseur de hip-hop debout se doit de connaître. Lors des battles de hip-hop « all style » ou dans la catégorie « Hip-Hop New Style » (comme au Juste Debout par exemple), les danseurs peuvent être amenés à danser sur des musiques new jack swing ou old school, et c’est là qu’on reconnaît les influences de la Hype dans leur freestyle. Les DJs incluent parfois un classique new jack swing dans leurs sets, poussant les compétiteurs à ressortir un pas de Running Man ou un Snake pour coller à l’énergie du son. Ainsi, même s’il a perdu le devant de la scène face à des styles plus récents à la fin des années 90, le new jack swing demeure une composante fondamentale de la culture hip-hop. Il est fréquemment cité comme faisant partie de l' »old school hip-hop », aux côtés du locking et du popping, bien que certains débattent de cette classification du fait de sa nature hybride R&B/hip-hop. Quoi qu’il en soit, son influence se fait sentir dans l’évolution de la danse hip-hop : il a inspiré les party dances ultérieures et préparé le terrain pour la danse hip-hop plus commerciale des années 2000.
En termes d’impact sur d’autres styles, le new jack swing a non seulement laissé des mouvements de base toujours utilisés, mais aussi une approche de la danse axée sur le groove et la connexion à la musique. Les chorégraphes des générations suivantes, par exemple ceux qui ont travaillé avec des artistes pop des années 2000, ont souvent grandi avec la Hype et en ont intégré l’esprit dans leurs créations. Le style a également contribué à mettre en avant l’aspect « fun » et festif du hip-hop (en accord avec le slogan originel de la Zulu Nation : « Peace, Love, Unity and Having Fun »), rappelant que le hip-hop est aussi célébration et partage.

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Caractéristiques du style new jack swing

Le new jack swing se distingue par une esthétique et une technique bien spécifiques, reflétant l’énergie de son époque. Voici ses caractéristiques principales :

Energie et attitude : c’est un style très énergique, souvent qualifié de « dansé en sautant ». Le danseur de Hype est en mouvement quasi constant, avec une démarche bondissante qui donne la sensation de rebondir à chaque pas. L’attitude générale est à la fête et à la joie, sourire, interactions avec le public ou les autres danseurs, clins d’œil, en contraste avec des styles plus sérieux ou agressifs. On parle d’une danse « très cardio », qui peut épuiser tant elle demande d’endurance et de tonicité.
Rythmique et rapport à la musique : La danse new jack swing s’exécute sur des morceaux au groove syncopé et swing (d’où le terme « swing »). Le danseur joue beaucoup sur le bounce (souplesse des genoux en rythme) et marque souvent chaque temps ou contre-temps de la musique par un mouvement. Le style exploite la rythmique ternaire caractéristique de certaines batteries new jack swing, ce qui se traduit par des micro-sauts et des appuis rapides. Il en résulte un feeling très rebondissant, parfaitement adapté aux beats innovants de la fin 80s/début 90s. La connexion musique-danse est primordiale : un bon danseur de new jack swing saura coller aux breaks et accents de la chanson par des variations de mouvements ou des arrêts soudains.
Mouvements typiques et techniques de base : Le new jack swing regorge de « pas de base » devenus classiques dans le hip-hop. Ces mouvements sont généralement simples à comprendre, ce qui a favorisé leur diffusion massive, mais demandent du style et de la coordination pour être bien exécutés. Ils se caractérisent par des jeux d’épaules marqués (hausser/abaisser les épaules en rythme est fréquent), des déplacements du poids du corps d’avant en arrière ou latéralement tout en gardant le haut du corps actif, et souvent une répétition cyclique (on enchaîne le même groove plusieurs mesures de suite). Visuellement, les mouvements sont dynamiques et variés, combinant des pas au sol, des petits sauts, des mouvements de bras et de torse, le tout dans un flux continu. Par ailleurs, la Hype incorpore parfois des éléments empruntés à d’autres disciplines : on y voit des isolations empruntées au jazz ou au funk, des ondulations (body rolls) rappelant le smurf/boogaloo, ou encore des kicks légers évoquant des pas de danse africaine, témoignage de son riche métissage culturel.
Tenue vestimentaire et style visuel : Impossible de dissocier le new jack swing de son style vestimentaire emblématique. A l’époque, les danseurs arboraient des vêtements flashy, colorés et amples, par exemple les ensembles baggy (pantalons larges), les vestes color-block, les baskets montantes, les accessoires fluo, etc. Cette mode accompagnait la danse en offrant aisance de mouvement et en reflétant l’esprit festif. Dans les clips, l’esthétique est tout aussi marquée : le new jack swing est associé à une identité visuelle vibrante et fun des années 90 (on peut penser au style de The Fresh Prince of Bel-Air incarné par Will Smith, qui illustrait parfaitement la hype).

Pour illustrer concrètement quelques mouvements emblématiques de la danse new jack swing, en voici une liste non exhaustive :

Running Man : Ce pas consiste à imiter une course sur place en glissant les pieds en arrière à chaque temps. Devenu un des mouvements de base incontournables du hip-hop, il a été popularisé par l’artiste MC Hammer au début des années 90 et symbolise immédiatement l’énergie de la Hype.
Roger Rabbit : Variante du Running Man effectuée en sautillant vers l’arrière, en tirant les bras en arrière comme le personnage du dessin animé Roger Rabbit. Ce move explosif est intimement lié à l’essor du new jack swing : au début des années 90, il faisait fureur et suivait presque systématiquement un Running Man dans les chorégraphies. Des artistes comme MC Hammer, Bobby Brown ou Vanilla Ice ont largement contribué à le diffuser auprès du grand public.
Cabbage Patch : Mouvement simple et convivial où l’on effectue une rotation des bras (poings fermés) en cercle devant soi, tout en pivotant le buste de gauche à droite au rythme. Très répandu car facile à apprendre, le Cabbage Patch « sauvait » même les non-danseurs dans les soirées 90’s : il suffisait d’écouter la musique et de faire tourner ses bras en rythme pour participer à la fête.
House Party Kick (Kid ‘n Play) : Pas de deux iconique introduit par le duo Kid ‘n Play. Les deux partenaires, face à face, exécutent un jeu de jambes synchronisé : ils tapent la semelle de leur chaussure l’une contre l’autre (kick) puis pivotent pour changer de jambe, le tout en sautillant. Apparu dans le film House Party (1990) lors d’un dance-off mémorable, ce mouvement est devenu un incontournable des soirées et démonstrations, tant il incarnait l’esprit festif et collectif du new jack swing.

Ces quelques exemples de pas illustrent la palette du new jack swing, faite de grooves accessibles, ludiques et efficaces visuellement. Bien d’autres mouvements pourraient être cités (tels que le Reebok, le Prep, le Wop, le Snake, etc…), chaque danseur apportant sa touche, mais tous partagent ce même esprit « hype » : un mélange de décontraction, de joie communicative et de technique rythmique. En somme, le style new jack swing en danse se définit par son groove bondissant, sa simplicité apparente enrichie de variations, et son ambiance résolument positive, un héritage des années 90 qui continue d’influencer la danse hip-hop actuelle.